Part. 2
Précisions sur l’esprit et l’essence spirituelle
En guise de préambule
De par sa nature même, l’esprit n’est limité ni dans l’espace ni dans le temps, mais il se manifeste chez l’être humain dans l’espace et le temps terrestre sous la forme de l’essence. L’essence permet à l’esprit de continuer à évoluer grâce aux expériences qu’il fait au cours de nombreuses vies. Mais cette évolution est totalement inaccessible et incompréhensible pour la pensée humaine. C’est la raison pour laquelle ceux qui cherchent à comprendre l’univers avec leur pensée n’en finiront de chercher et ne trouveront jamais. Seul l’être humain qui entre en contact avec l’esprit peut percevoir et de façon immédiate (étymologiquement = “sans intermédiaire”) la réalité des univers. Cette connaissance est absolue, mais il est impossible de transmettre cette réalité sans limites à des cerveaux limités, avec l’outil limité qu’est la pensée.
L’essence est porteuse de la mémoire des différentes vies. Cela signifie aussi qu’elle porte les conséquences de tout ce qui s’est passé au cours de ces vies et qu’elle connaît les conditions nécessaires à la réalisation de son destin au cours d’une nouvelle vie terrestre : elle s’incarne dans un corps physique particulier et un milieu particulier qui lui permettront de compenser un karma négatif du passé et de se réaliser davantage dans un mouvement d’évolution au diapason de la vie cosmique.
La nature de l’essence est la même que celle de l’esprit, elle en a les qualités : amour, compassion, joie, sérénité. Mais, au cours de nombreuses vies, son état d’amour a été blessé, sa bienveillance n’a pas pu se manifester, sa joie a été refoulée et sa sérénité a été battue en brèche. L’essence porte ces blessures et, au cours de cette vie, elle va essayer de les réparer.
Les “petits moi”
Revenons à la personnalité, qui s’est progressivement construite sur les expériences et les traumatismes de l’enfant. Cette personnalité n’est pas unifiée. La 4e Voie de Gurdjieff dit que l’être humain vit dans une grave illusion : il croit être une individualité unique alors qu’il est multiple. Déjà, il est tiraillé entre les pulsions de son corps physique (besoin de parler, manger, bouger, besoin de sexualité), son psychisme (désir de gagner plus d’argent, d’avoir une plus grosse voiture, de plaire ou de séduire, de s’acheter une enième paire de chaussures, de partir en week-end ou de faire un repas gastronomique) et son esprit. Il est tiraillé entre ce qu’il veut et ce qu’il fait, ce qu’il pense et ce qu’il ressent. Vous savez bien que vous pouvez à certains moments aimer votre conjoint et à d’autres moins. Vous savez aussi que vous pouvez vous mettre en colère et vous comporter de façon brutale avec votre enfant alors que vous ressentez beaucoup d’amour pour lui. Vous savez que vous pouvez avoir décidé de perdre du poids et pourtant ne pas arriver à arrêter de grignoter toute la journée, que vous voulez être civilisé et pourtant agonir d’insultes le chauffard qui vous fait une queue de poisson, etc. Toutes ces contradictions entre ce que vous voulez et ce que vous faites, ce que vous pensez et ce que vous ressentez, sont liées à votre multiplicité, votre division intérieure. Vous êtes sans cesse tiraillés entre les multiples fragments de votre personnalité. Ce sont ces fragments qu’on appelle les “petits moi”. Certains sont positifs ils sont un atout, ils ne vous posent aucun problème : le petit moi enthousiaste, le petit moi généreux, le petit moi attentionné, etc. Mais d’autres sont négatifs : le petit moi colérique, le petit moi jaloux, le petit moi avare, etc. et sont source de difficultés dans votre vie relationnelle et intérieure. D’autres encore sont tellement enfouis sous les voiles de vos illusions que vous les avez refoulés dans votre inconscient.
Toutes ces contradictions entre ce que vous voulez et ce que vous faites
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L’évolution spirituelle passe nécessairement par la découverte de celui ou celle que je suis réellement, ce qui signifie voir la réalité de ma fragmentation, de ces “moi” multiples qui essaient de s’imposer à qui je suis réellement, qui se succèdent constamment en moi en essayant de me faire croire qu’ils sont ce que je suis alors qu’ils ne sont que des fragments de ma personnalité. Seul celui qui arrive à être en contact avec son essence peut avancer sur le chemin de cette aventure véritable qu’est la spiritualité. Tous les autres errent d’un “petit moi” à un autre. Tant qu’on est prisonnier d’un de ces fragments, que ce soit le “petit moi” de l’avidité, de l’orgueil, de la peur, etc., on reste dans leur sphère et elle est limitée. Celui qui s’en détache peut s’aventurer dans des domaines tout à fait insoupçonnés de la plupart des êtres humains.
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La seule façon de se connaître réellement est par l’observation directe de soi et de ces multiples “petits moi” en soi. Il faut apprendre quoi observer, comment observer. Observer ses façons de bouger, de ressentir, de réagir constamment. Seule l’observation conduit à reconnaître la multiplicité de nos “petits moi” : le moi confiant, le moi courageux, le moi impatient, le moi arrogant… Chacun de ces “petits moi”, à un moment, vient sur le devant de la scène en fonction des événements extérieurs et il nous dicte nos pensées, nos émotions et nos actions du moment, puis il disparaît pour laisser place à un autre moi. Sans que nous le décidions vraiment. Observez ce qui se passe dans vos journées : vous vous réveillez de bonne humeur, mais votre enfant a encore une fois laissé sa serviette trempée sur le sol de la salle de bains, et cela vous énerve. Vous prenez une bonne tasse de café et vous voilà rasséréné, puis votre voiture refuse de démarrer et vous perdez patience, mais quand vous voyez le magnifique lever du soleil, vous êtes plein de joie, etc. Vous passez (à votre insu) constamment d’un petit moi à un autre parce que vous vous identifiez constamment à votre vie extérieure, à votre personnalité, à votre corps physique, à l’image que vous voulez donner aux autres. Le véritable problème des “petits moi” est qu’ils dirigent votre vie alors que leur fonction initiale consistait à protéger votre essence. Pis encore, ils se manifestent le plus souvent à des moments inadéquats.
La base, le début et la fin du chemin intérieur : observer
Pour commencer à exister à partir de votre essence et de votre esprit, il faut d’abord arrêter de réagir à partir de votre personnalité et la seule façon de le faire, c’est d’observer comment elle fonctionne, ses réactions habituelles, ses attitudes mécaniques et automatiques. L’observation est la base, le début et la fin du chemin intérieur. Observez votre façon habituelle de penser, d’avoir des émotions, des réactions, observez vos paroles, vos attitudes. Quand vous apprenez à connaître celui pour qui vous vous prenez ou que vous semblez être, grâce à votre observation directe de votre façon de bouger, de parler, de réagir aux situations ou aux autres, vous savez que vous n’êtes pas votre personnalité. Votre personnalité s’est construite autour de votre essence après votre naissance et vous devez la reconnaître, mais elle n’est pas vous.
Décidez qui vous voulez être
Qu’est-ce qui fait qu’une vie est heureuse ou malheureuse ? Notre bonheur ou notre malheur dépend-il des événements extérieurs ou de nos états intérieurs ? Parfois, il est vrai, il y a correspondance entre les deux, mais ce n’est pas toujours le cas. Imaginons quelqu’un d’optimiste, de naturellement gai, qui a l’esprit d’initiative : quand un obstacle ou une difficulté se présente sur sa route, cela change-t-il quelque chose à sa vie intérieure ? Peu importe la difficulté (à moins qu’il s’agisse d’une catastrophe, mais il n’en arrive pas tous les jours), il la résout et passe à autre chose. Il lui arrive des ennuis comme à tout le monde, et pourtant, ces ennuis n’entachent pas son état intérieur et s’il arrive à garder son optimisme jusqu’à la fin de sa vie, on pourra dire qu’il a vécu heureux.
Le pessimiste, au contraire, celui qui a toujours matière à mécontentement, à critique, aura beaucoup de mal à surmonter les situations difficiles, qu’il va d’ailleurs aggraver encore par toute sa négativité, et même s’il lui arrive des choses heureuses, il ne devient pas plus heureux pour autant.
Ces exemples un peu caricaturaux vous montrent que vous pouvez décider de celui que vous voulez être, vous pouvez décider de ne plus vous laisser emporter par un de vos petits moi. Vous pouvez décider de recevoir triomphes et défaites d’un même front, pour reprendre le célèbre poème de R. Kipling (“Tu seras un homme, mon fils”). Vous pouvez le décider, mais il est vrai aussi qu’un homme seul, une femme seule, ne peut pas faire grand-chose : pour avancer sur un chemin d’évolution spirituelle, on a besoin de l’aide des autres, notamment l’aide de ceux qui ont déjà parcouru ce chemin. En outre, seul un chemin spirituel vous donnera les informations et vous enseignera les pratiques nécessaires pour accéder à votre être véritable, votre essence, votre esprit. Cela, aucune technique de développement personnel, si géniale soit-elle, ne le pourra pas : elle nous pourra qu’enrichir votre personnalité.