Part. 3
Des Au-delà de toutes les formes d’opposition, il y a l’Unique
Zarathoustra (ou Zoroastre)
Le but des Maîtres fut donc, dès le début, de créer les conditions nécessaires à l’évolution de l’esprit humain. Cette mission incomba en particulier à un personnage historique et mythique de l’ancienne Perse : Zarathoustra, qu’on appelle aussi Zoroastre. Avant son époque, la vie des hommes était nécessairement assujettie à la domination socio-politique des rois et à la domination religieuse des prêtres. La mission de Zarathoustra fut de proposer une dimension nouvelle grâce à une plus grande diffusion du principe selon lequel les êtres hiérarchiques, ou les dieux, ont besoin de l’aide de tous les hommes et de toutes les femmes de bien.
Zarathoustra enseignait qu’il y a deux sortes de dieux : les dieux de lumière et ceux des ténèbres. Le dieu de lumière, Ahura Mazda, aidait l’être humain à évoluer et à réaliser sa propre nature, alors que le dieu des ténèbres, Ahriman, cherchait à utiliser la nature humaine pour ses propres fins. Une lutte permanente, dont l’enjeu était l’être humain lui-même, avait lieu entre ces dieux, à la fois dans le cosmos et à l’intérieur même des êtres humains. La mission des Maîtres de Sagesse fut d’enseigner aux humains à ne plus être des marionnettes dans ce combat entre les dieux de lumière et des ténèbres.
L’autre aspect de la mission de Zarathoustra fut de préparer l’intervention de l’être de lumière que les chrétiens appellent le Christ. En relisant les Evangiles, on peut s’étonner de constater à quel point l’Occident ne les a pas compris. Les églises occidentales prêchent que, pour arriver à Dieu, il suffit d’observer les lois et les devoirs religieux. Les Evangiles disent tout le contraire : “Si votre justice ne dépasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux”. (Matthieu 5, 20). Pour entrer dans le Royaume des cieux, pour arriver à la Connaissance, il faut bien plus que l’application des règles et des devoirs religieux, il faut aller au-delà. C’est ce que les Ecoles de Sagesse ont toujours enseigné.
Noé et ses fils
Vous connaissez certainement l’histoire de Noé. La Bible raconte qu’il eut trois fils : Sem, Japhet et Cham. Après le déluge, dont ils sont les seuls survivants, Noé et ses fils créèrent une nouvelle humanité. On dit que le premier fils, Sem, était porteur de toute la spiritualité de l’humanité, ses descendants gardent la perception directe du monde spirituel ; que Japhet donna naissance à l’humanité normale, ordinaire ; et que les descendants de Cham sont la “race perdue”. Mais les descendants de Sem finissent par disparaître parce que l’humanité perd peu à peu tout lien avec le monde spirituel. C’est la raison pour laquelle Dieu ou les dieux décidèrent un jour d’envoyer un sauveur sur Terre. Des deux types d’êtres humains restants, on dit de ceux de Cham qu’ils ne développent pas leur âme. Ils sont ceux que la science matérialiste appelle des animaux supérieurs. Ils vivent comme des animaux évolués, mais n’ont pas accédé au niveau réellement humain…
Dieu ou les dieux décidèrent un jour d’envoyer un sauveur sur Terre.
De Manès à aujourd’hui
Un autre des grands initiés se nommait Mani, ou Manès. Il vécut trois siècles après Jésus-Christ dans l’ancienne Perse qu’on appelle aujourd’hui l’Iran. C’était un grand philosophe, un grand mystique et un grand peintre (c’est de lui que datent toutes les miniatures persanes).
On dit que ce Manès est à l’origine de ce qu’on appelle la doctrine manichéenne, mot assez péjoratif aujourd’hui : c’est bien ou mal, noir ou blanc. Or, ce n’est pas là la doctrine de Manès. O dit aussi que Manès fit une grande synthèse des religions de l’Inde, du christianisme, du judaïsme et du bouddhisme, mais on oublie le plus important : la base de sa doctrine était le taoïsme, qui n’est pourtant jamais cité lorsqu’on présente Manès. La non-dualité du taoïsme se retrouve dans la doctrine de Manès : il y a le bien et le mal, le noir et le blanc, le yin et le yang mais, au-delà de toutes les formes d’opposition, il y a l’Unique qui englobe tout. Le manichéisme a eu une grande influence dans les domaines spirituel et ésotérique de toutes sortes de religions. Les soufis de l’Islam, les Bogomiles (le mot signifie : “ami de Dieu”) et les Cathares (aussi appelés les Albigeois), par exemple, ont été très fortement influencés par la doctrine manichéenne.
Au-delà de toutes les formes d’opposition, il y a l’Unique qui englobe tout.
Des réincarnations du même phénomène se sont produites au 17e siècle, lorsque les huguenots, chassés un peu partout, se réfugièrent en nombre dans les Cévennes. Il y eut là comme une guerre de religion : une croisade des catholiques et de leur royauté contre les protestants huguenots qui s’étaient installés principalement dans cette région et qu’on appelle les camisards. Ces camisards s’insurgeaient contre les persécutions de masse qui suivirent la révocation par Louis XIV de l’édit de Nantes qui octroyait aux protestants une liberté de culte. Ces camisards, des gens qui pensaient un peu différemment, un peu plus librement et en même temps de façon plus spirituelle, furent à leur tour persécutés, mais trouvèrent malgré tout le moyen de survivre, parfois en faisant semblant de se convertir à ce qu’on leur demandait, d’autres fois en partant ailleurs.
Il faut se souvenir que Manès avait eu pour mission de réconcilier le judaïsme, le christianisme, l’hindouisme, le bouddhisme et le taoïsme. Notre propre façon d’aborder la spiritualité va, bien sûr, au-delà de ce que représentent les religions organisées, qui ont toujours combattu les vrais mouvements spirituels. Manès lui-même, comme beaucoup d’autres, considérait qu’à partir du moment où les religions sont reconnues par les états, elles sont dévoyées par la politique et par l’argent. Voilà pourquoi ces mouvements ont préféré vivre dans beaucoup de discrétion et de simplicité, souvent dans une forme de pauvreté, en tout cas de détachement des biens matériels. Tout ce passé est plein d’énergie et de grandes pensées spirituelles qui sont toujours vivantes à l’heure actuelle.